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Nous sommes des êtres cycliquesTout ce qui vit alterne. Cycle de la naissance, de la maturation et de la mort, cycles des saisons au cours d'une même année, cycles du jour et de la nuit, cycles différents de sommeil au cours d'une même nuit, cycles de la lune, cycles mensuels et menstruels des femmes, cycles longs, bi-annuels ou annuels, alternant là encore des périodes actives et des périodes plus ralenties. Ne sommes-nous pas les enfants de paysans pauvres qui travaillaient l'été, se reposaient l'hiver, avec des bonnes années où la chaleur et l'alimentation étaient abondantes, et des années de disette et de repli ? Tout ce qui vit alterne des périodes d'activité et des périodes de repos. Cette périodicité existe d'abord chez les végétaux: alternance saisonnière bien sûr, mais aussi alternance journalière bien visible chez certaines fleurs. Ainsi les "belles de jour" ouvrent leurs corolles le matin et les referment le soir, tandis que les "belles de nuit" font le contraire. Les insectes, les reptiles ont nettement des moments d'activité et des moments de repos. Les poissons s'immobilisent sur le ventre ou sur le côté, à la surface ou au fond de l'eau. Pour tous ces animaux, on parle de "dormance", pas encore de sommeil. Le sommeil complexe, dans sa forme évoluée, est apparu il y a cent millions d'années avec les oiseaux, mais ce sommeil est encore très différent de notre sommeil humain. Par contre, plus haut dans l'échelle animale, les différents mammifères étudiés - chats, rats, singes - ont des états de vigilance très proches des nôtres. Les animaux chasseurs, les grands fauves, ont un sommeil plus profond que leurs proies, qui, elles, ont une plus large part de sommeil léger. Les animaux chassés ont très peu de sommeil paradoxal, dont la paralysie les rendrait très vulnérables. Les dauphins, eux, ne dorment systématiquement que d'un oeil, ou plus exactement d'un cerveau, puisqu'ils alternent des éveils du cerveau droit pendant que le gauche dort, puis l'inverse. Notre sommeil d'hommes adultes conserve l'empreinte de cette évolution. Nous en retrouvons la trace dans les études de l'évolution phylogénétique des espèces, dans les recherches sur le sommeil des mammifères qui, tel le cochon d'Inde, naissent cérébralement adultes, dans celles sur le développement progressif du sommeil (études ontogénétiques) des espèces qui naissent, comme l'homme, très immatures: raton, chaton, bébé kangourou... Tous ces travaux nous permettent de mieux comprendre notre sommeil, son développement, certaines de ses anomalies. Ils permettent de lever un peu le mystère sur sa fonction. A quoi sert le sommeil, pourquoi dormons nous ? Questions auxquelles nous n'avons pas encore de vraies réponses. Dans tout ce chapitre, nous nous attacherons à décrire les différents états de vigilance et les cycles de l'homme adulte. Il peut sembler surprenant, dans un livre consacré à l'enfant, de rédiger un chapitre entier sur le sommeil de l'adulte, pourtant cela nous paraît indispensable.
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