Le sommeil, le rêve et l'enfant
Challamel M.J., Thirion M.
TABLE DES MATIERES
Comment étudie-t-on le sommeil ?
Les cinq stades du sommeil d'une nuit normale
L'agenda de sommeil
Nous sommes des êtres cycliques
Pour commencer, quelques définitions
Les trois états de vigilance
Que se passe-t-il au cours d'une nuit de sommeil?
Les besoins de sommeil
Chronobiologie et rythmes circadiens
Les rythmes circadiens de vigilance
Comment interpréter cette courbe?
Les expériences "hors du temps"
Les horloges biologiques
Les altérations de rythme
Ce qu'il faut retenir
De la vie foetale à l'adolescence, le sommeil se construit et s'organise
Les états de vigilance du nouveau né
Le sommeil calme (stade I)
Le sommeil agité (stade II)
L'état de veille calme (stade III)
Les états de veille agitée (stades IV et V)
Le sommeil du foetus
Le sommeil du nouveau-né prématuré
Les états de vigilance pendant l'accouchement
Le sommeil du nouveau-né et du premier mois de vie
L'enfant de 1 à 6 mois
L'enfant entre 6 mois et 4 ans
L'enfant de 4 à 12 ans
Le sommeil de l'adolescent
FIGURES

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Chronobiologie et rythmes circadiens

La chronobiologie est l'étude des rythmes biologiques auxquels sont soumis les êtres vivants.

Les différents pics et creux de ces rythmes ne sont pas distribués au hasard, mais relèvent d'une véritable programmation dans le temps des nombreuses activités: métaboliques, nerveuses, endocriniennes... permettant un ajustement de l'organisme au mode de vie. Cette adaptation n'est pas individuelle, mais spécifique de l'espèce. Ainsi l'humain, homo sapiens, est un "animal" à activité diurne, et tous ses rythmes biologiques, son organisation temporelle, répondent à la nécessité de faire face, physiquement et intellectuellement, à son activité diurne. Ainsi les performances du système nerveux (attention, coordination motrice, mémoire), la force musculaire, la fréquence cardiaque et respiratoire atteignent leur maximum au cours de la journée. Par contre, d'autres variations biologiques, comme le taux de lymphocytes cellules blanches du sang qui participent à la défense anti-infectieuse de l'organisme -, sont au maximum au milieu de la nuit.

Un exemple frappant de cette adaptation biologique quotidienne est celui des sécrétions hormonales: L'hormone corticotrope, ou ACTH, a son pic de sécrétion maximum au milieu de la nuit. Elle induit la sécrétion d'hormones telles que la cortisone ou le cortisol, qui ont pour effet d'augmenter les taux sanguins de protéines, lipides, glucides et sels mineraux pour les besoins d'un organisme en activité. Or, les pics sanguins maximum de cortisol se situent au moment de l'éveil. Il y a donc cohérence biologique, le pic d'ACTH se situant avant celui du cortisol, lui-même se situant avant le pic des performances musculaires, nerveuses, etc. de l'organisme. Il y a donc bien pré-adaptation.

Cette notion d'organisation temporelle a une réelle importance, non seulement théorique, mais aussi pratique. Les accidents de voiture ou d'avion dus à une "erreur humaine" se produisent souvent vers deux ou trois heures du matin, heure où les potentialités physiques, psychiques et intellectuelles des humains sont au plus bas. C'est le moment où les réponses, les réflexes sont les plus lents et les moins adéquats. Le chronobiologiste américain Charles Ehret de Chicago a même rapporté que la gravité de l'accident à l'usine nucléaire de Three-Mile-Island était en grande partie due au fait que la centrale s'était emballée à trois heures du matin. Les ingénieurs et techniciens de garde ont été incapables de prendre en temps voulu les décisions qui s'imposaient.

Autre utilité pratique essentielle de cette chronobiologie: notre organisme ne réagit pas de la même façon aux médicaments selon l'heure où ils sont ingérés. Pour certaines thérapeutiques hormonales, comme la stimulation du cortisol par l'ACTH la même dose peut être strictement inefficace à six heures du soir et parfaitement adaptée à sept heures du matin. Autre exemple : la stimulation hypophyso-ovarienne par la LH-RH n'a aucune efficacité en perfusion continue, même à très fortes doses, et ne marche que si l'on effectue une stimulation de quelques minutes toutes les heures. Cette découverte, utilisée maintenant dans le traitement de certaines stérilités, prouve bien que les effets qualitatifs et quantitatifs d'un traitement hormonal dépendent plus du rythme de sa biodisponibilité que de la dose théoriquement utile.

Figure 11 : Les fonctions biologiques ont des activités rythmiques dont les pics et les creux ne sont pas distribués au hasard, mais représentent une organisation dans le temps.

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