Le rêve
Michel Jouvet
La Recherche
TABLE DES MATIERES
Sommaire
Un troisième état de vigilance
Les frontières objectives du rêve
A la recherche d'un "centre" du rêve
La régulation biochimique du cycle veille-sommeil
Trois clés pour le rêve dans la théorie monoaminergique
Un orage cérébral
L'histoire naturelle du rêve
Les fonctions du rêve
Le rêve, programmation génétique des instincts ?
Rêve et plasticité
La privation de rêve
Pour en savoir plus
FIGURES

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La régulation biochimique du cycle veille-sommeil

L'éveil. Le rôle de la noradrénaline (issue de la partie rostrale du com plexe coeruléen) dans l'entretien de l'éveil cortical (et peut-être de certains types d'apprentissage) est fortement suggéré par les expériences suivantes : l'inhibition de la synthèse des catecholamines grâce à l'alpha méthyltyrosine (qui inhibe la tyrosine hydroxylase) conduit à une diminution considérable de l'éveil cortical et comportemental. Le même résultat est entraîné par des lésions du faisceau noradrenergique dorsal. Il existe ainsi bonne corrélation entre la diminution de l'éveil et la diminution de la noradrénaline cérébrale.

Le sommeil. Le rôle du système sérotoninergique dans l'endormissement est maintenant bien établi par les expériences suivantes: l'inhibition la synthèse de la sérotonine par p. chlorophénylalanine (qui inhibe tryptophane hydroxylase) produit une insomnie quasi totale (et également une suppression du sommeil paradoxal. Cependant, si l'on court-circuite l'étape de blocage de la p. chlorophénylanine en injectant de faibles doses 5-hydroxy-tryptophane, le précurseur direct de la sérotonine (qui traverse barrière hémato-méningée), on peut rétablir immediatement un sommeil normal qui conduit au sommeil paradoxal. Ce sont les neurones contenus da la partie rostrale du système du raphé qui semblent jouer le rôle le plus important, comme en témoigne l'insomnie totale obtenue par destruction des noyaux centralis superior et raphé dorsalis. Dans ce cas, il existe une correlation très étroite entre l'intensité, l'insomnie, la diminution de sérotonine, au niveau des terminales et la quantité de corps cellulaires détruite par la lésion. Des résultats comparables ont été obtenus récemment en "empoisonnant" sélectivement les neurones sérotoninergiques avec la 5-6 HT.

Il apparaît donc qu'éveil et sommeil sont sous la dépendance de deux systèmes antagonistes, et, comme on pouvait s'y attendre, des régulations complexes semblent s'effectuer entre ces deux systèmes.

Ainsi l'inactivation des neurones noradrenergiques, dont les axones empruntent le faisceau dorsal noradrénergique, entraîne bien un diminution de l'éveil mais en même temps elle entrame une activation des neurones sérotoninergiques (qui s'objective par une augmentation de la synthèse de sérotonine et de son "turn over". Cela conduit donc à une augmentation sommeil et, par conséquence, du rêve. Dans certains cas, l'augmentation du rêve devient considérable (plus 600 minutes par jour au lieu de 200). Inversement, l'inactivation des neurones sérotoninergiques (par destruction du système du raphé par exemple) entraîne l'activation des neurones catécholaminergiques responsables de l'éveil. On conçoit ainsi que l'insomnie puisse avoir plusieurs mécanismes (que l'on retrouve en clinique humaine, et qui conditionnent son traitement) soit par activation de certains neurones catécholaminergiques, soit par inactivation des neurones sérotoninergiques, soit les deux à la fois. De même l'éveil pourra être diminué de deux façons : soit par inactivation isolée des neurones catécholaminergiques; il s'agit alors d'un a-éveil (augmentation sur tout du stade I du sommeil) plus que de véritable sommeil, et le rêve est en général diminue; soit par activation du système sérotoninergique; dans ce cas, il s'agit bien de véritable hypersomnie (avec augmentation harmonieuse des stades III et IV et du rêve).

Figure 5A
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Figure 5B
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Figure 5C
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