Le rêve
Michel Jouvet
La Recherche

Le rêve, cette activité cérébrale incontrôlée à laquelle l'homme passe près de 10 % de sa vie, n'a pas cessé de l'intriguer depuis les temps les plus reculés. Toutefois, l'auréole quasi mystique qui entourait ce phénomène psychique devait le maintenir longtemps hors de toute tentative d'approche expérimentale.

Il n'y a guère plus de vingt ans en effet que l'étude du rêve préoccupe les neurophysiologistes. Mais si le sujet avait attendu longtemps, du moins les techniques étaient-elles mûres, ou presque.

Nous disposons aujourd'hui d'une théorie biochimique unitaire du cycle veille-sommeil dans lequel s'inscrit le rêve. Elle repose sur des fondements expérimentaux chaque jour mieux étayés. C'est la fonction de l'activité onirique qui préoccupe aujourd'hui les neurophysiologistes du rêve.

A soixante ans, un homme a passé près de cinq ans de son existence dans l'univers prodigieusement riche du rêve. Ces cinq années de vie imaginaire se sont écoulées par petites séquences serties au coeur de quinze années de sommeil sans rêve. Ainsi, soixante ans d'existence peuvent-ils se résumer en quarante ans d'activité physique et mentale passés en état d'éveil et vingt ans de sommeil: quarante ans consacrés à la réception et au traitement des informations en provenance du milieu extérieur, à la réalisation de comportements nécessaires à la conservation de l'individu et de l'espèce; vingt ans sans contact conscient avec l'univers ambiant, entrecoupés de plusieurs dizaines de milliers d'épisodes au cours desquels le dormeur assiste ou participe presque paralysé au déroulement du spectacle onirique.

Dès l'aube de l'humanité, les dormeurs se sont étonnés du contenu de leurs rêves: comment un homme pouvait-il s'expliquer qu'il était en train de courir ou de voler au cours d'un rêve alors que tous les témoins lui assuraient que son corps endormi reposait immobile ? Jusqu'au XVllle siècle, on admit que le corps matériel subissait la "mort périodique " du sommeil, tandis que l'âme immatérielle lui échappait. Son état d'éveil et d'activité permanente se manifestait alors au cours du rêve, qui devait être un phénomène continu.

Avec les débuts du matérialisme, la conception idéaliste selon laquelle l'âme serait responsable de l'activité onirique devait subir un premier assaut expérimental. De nombreuses observations montrèrent que lorsqu'on éveille un dormeur, il se souvient rarement avoir rêvé. Le rêve n'était donc probablement pas un phénomène continu mais bien plutôt un événement épisodique survenant au cours du sommeil. C'est Alfred Maury qui, vers 1850, proposa une première interprétation non métaphysique de l'apparition du rêve. Pour lui, l'activité onirique ne survient que lorsque le sommeil est léger : nous rêvons lorsque nous nous endormons (hallucinations hypnagogique ou au contraire lorsque le sommeil profond est allégé par un bruit, une douleur ou toute autre stimulation interne ou externe. Le sommeil se rapproche alors de l'éveil, ouvrant ainsi la porte au rêve. Pour Maury, le rêve était donc un accident épisodique représenté par une phase de sommeil intermédiaire entre le sommeil profond et l'éveil.

Il falllut attendre 1953 et le début travaux d'Eugen Aserinski et de Nathaniel Kleitman pour que l'étude du rêve fasse son entrée dans le domaine de la neurophysiologie. Entre 1954 et 1958, les développements considérables de la polygraphie (enregistrements simultanés de l'activité nerveuse, du tonus musculaire, des mouvements oculaires, des rythmes respiratoire, cardiaque, etc.) devaient permettre à Kleitman, Aserinski et William Dement, à Chicago, de déterminer les frontières du rêve au cours du sommeil nocturne.

Un troisième état de vigilance

Les enregistrements continus au cours du sommeil nocturne révélèrent alors une notion nouvelle : l'apparition du rêve n'est pas aléatoire mais périodique. Chez l'homme, il survient environ toutes les 90 minutes au cours du sommeil et dure chaque fois 15 à 20 minutes. Cependant, pour l'école de Chicago, le rêve restait encore un sommeil léger, périodique, intermédiaire entre la veille et le sommeil profond. Il fut ainsi assimilé à la période d'endormissement (stade 1) d'où le nom d "emergent stage one " qui lui fut donné. En fait, c'est l'expérimentation animale qui devait permettre de placer le rêve à sa véritable place dans le cycle veille-sommeil.

Dès 1937, Klaue avait ouvert la voie en décrivant, chez le chat porteur d'électrodes chroniquement implantées, le "sommeil léger" avec ondes lentes et le sommeil profond (tiefen Schlaf) avec activité corticale rapide. Ces travaux trop précoces furent oubliés. En 1958, Dement décrivait chez le chat un stade intermédiaire entre l'éveil et le sommeil qu'il nomma "sommeil activé", caractérisé, comme le rêve chez l'homme, par une activité corticale rapide et des mouvements oculaires. A cette époque, avec François Michel, nous étudiions à Lyon des chats dont nous avions enlevé le cortex cérébral; ces "préparations décortiquées", que nous gardions en vie plusieurs semaines, nous permettaient d'explorer l'activité nerveuse sous-corticale au niveau mésencéphale. A notre surprise, cette activité demeurait parfaitement monotone, sans l'habituelle alternance d'ondes lentes et d'activité rapide que l'on enregistre au niveau du cortex. Aussi, afin de disposer de critères objectifs pour déterminer le passage de l'animal de l'état de veille à celui de sommeil, nous décidâmes d'implanter des électrodes permanentes dans les muscles de la nuque, et d'enregistrer également la formation réticulée pontique, qui se trouve juste en dessous du mésencéphale. Au cours d'enregistrements de longue durée, nous eûmes la surprise de voir apparaître régulièrement des périodes de 6 minutes environ au cours desquelles toute activité musculaire dis paraissait. Cette atonie totale était accompagnée d'une activité électrique de "pointes" de haut voltage apparais sant au niveau de la formatlon réticulée pontique. La polygraphie nous révéla rapidement que l'apparition de cette activité électrique intermittente était liée à celle des mouvements oculaires et que, chez l'animal intact endormi, la disparition totale du tonus musculaire s'accompagnait d'une activité corticale rapide. N'était-il pas paradoxal de trouver des ondes corticales rapides, typiques de l'état d'éveil, associées à un sommeil profond si l'on en jugeait par la relaxation musculaire totale et l'élévation considérable de l'intensité des stimulations nécessaires pour réveiller le dormeur ? Au vu de ces singularités, nous avons proposé d'appeler cet état "phase paradoxale du sommeil" ou "sommeil paradoxal" et de le considérer comme un troisième état de vigilance, aussi différent du sommeil que ce dernier est différent de l'éveil. Comme nous le verrons, la phénoménologie n'est pas seule à suggérer l'existence de trois états de vigilance distincts: éveil, sommeil et rêve. Les données de la neurophysiologie, de la neurochimie, de l'ontogénèse et de la phylogénèse corroborent cette théorie. Elle n'est d'ailleurs pas nouvelle puisqu'elle avait déjà été exprimée il y a deux mille ans dans la mythologie indienne, les Upanishads !

Les frontières objectives de trois états de vigilance bien distincts ont pu être délimitées grâce au developpement de la polygraphie chez le chat. Il s'agit de l éveil du sommeil lent et du sommeil paradoxal bientôt assimilé au rêve.

Figure 1A
Cliquer pour agrandir
Figure 1B
Cliquer pour agrandir

Le rêve - Les frontières objectives du rêve

Mais comment a-t-on été conduit à assimiler sommeil paradoxal et rêve ? Et que sait, aujourd'hui, le neurophysiologiste sur cette activité, ses conditions d'apparition et ses mécanismes intrinsèques ? Etablir les critères qui permettent de délimiter objectivement les frontières des trois états de vigilance constituait. bien entendu, un préalable sine qua non à leur étude. Ainsi, chez le chat, l'état d'éveil est caractérisé par une activité corticale rapide, une activité sous-corticale de bas voltage et un tonus musculaire important. L'endormissement et le sommeil "classique" quant à eux se reconnaissent au ralentissement des activités corticale et sous-corticale, avec apparition de fuseaux (stade I) bientôt accompagnés d'ondes lentes de haut voltage à une fréquence caractéristique de 3 a 5 cycles par seconde (stade II, elles ont valu à cet etat la dénomination désormais classique de "sommeil lent". Le tonus musculaire est conservé au cours du sommeil lent. Le sommeil paradoxal est toujours precédé par une période de sommeil lent. Il survient assez régulièrement, toutes les 30 minutes, et dure 6 minutes environ. Il se signale à l'expérimentateur par l'apparition de deux types de phénomènes nouveaux, les uns toniques, les autres phasiques. Au niveau cérébral, le principal signe tonique est caracterisé par une activité corticale et sous-corticale rapide continue et de bas voltage presque identique à celle de l'état d'eveil. Elle est accompagnée d'une élévation importante de la température cérébrale qui témoigne d'une augmentation du métabolisme. Nous nous trouvons donc en présence d'un phénomène très actif. Autre signe tonique: la disparition totale du tonus musculaire. Quant aux signes phasiques. ils ne sont pas moins importants. Ils sont représentés par des pointes de haut voltage que l'on enregistre au niveau du pont (vers les noyaux oculo-moteurs), du noyau genouillé latéral et du cortex occipItal., ce qui leur a valu le nom d'activité PGO. Ces phénomènes phasique centraux sont responsables des phénomènes phasiques périphériques tel que mouvements oculaires.

Chez l'homme, des dizaines de milliers d'enregistrements de sommeil nocturne ont permis d'établir le profil typique d'une nuit de sommeil En général, un sujet adulte qui s'endort passe successivement par quatre stades de sommeil, du plus léger (l'endormissement) au plus profond (IV) pendant les deux premières heures de sommeil. La première phase de sommeil paradoxal apparaît en moyenne 120 minutes après l'endormissement et dure 15 minutes environ. Elle marque l'achèvement du premier cycle de sommeil. Ensuite un deuxième cycle va survenir qui va durer 90 minutes envlron et se terminer par une phase de sommeil paradoxal de 15 à 20 minutes. Ainsi au cours d'une nuit, 4 ou 5 cycles de sommeil et de rêve vont se succéder si bien qu'à la fin de la nuit le sommeil paradoxal aura constitué 20 % de la durée totale du sommeil, soit environ 100 minutes. Les arguments permettant d'assimiler l'activité onirique au sommeil paradoxal sont solides: des sujets réveillés au cours ou immédiatement après une phase de sommeil paradoxal se souviennent avec beaucoup de détail de leur rêve, tandis que des éveils au cours des autres stades du sommeil n'entraînent que des souvenirs flous ou pas de souvenir du tout. Il existe également une certaine corrélation entre l'intensité des phénomènes phasiques au cours du sommeil paradoxal (mouvements oculaires, pause respiratoire, accélération cardiaque) et l'intensité dramatique du rêve. Enfin, dans certains cas exceptionnels, il est possible de repérer des séquences caractéristiques de mouvements oculaires au cours du rêve correspondant au spectacle onirique (par exemple des mouvements de droite à gauche répétés correspondant au rêve d'assister à une partie de tennis).

Nous verrons que l'assimilation rêve sommeil paradoxal est également justifiée chez l'animal, mais il fallut attendre un stade avancé de nos connaissances pour en acquérir la certitude définitive.

Les critères objectifs du rêve

Même sans le secours de l'électroencéphalogramme, il est possible de reconnaitre l'apparition des périodes de rêve au cours du sommeil grace aux signes périphériques suivants :

  sommeil rêve
réflexes tendineux présents absents
tonus musculaire présent absent (*)
yeux immobiles ou mouvements pendulaires très lents animés de mouvements rapides verticaux ou horizontaux
pupilles toujours en myosis myosis; parfois dilatation très fugitive
respiration lente et régulière irrégulière; parfois longues pauses (**)
rythme cardiaque régulier, lent irrégulier; accelerations et ralentissements subits
pénis flasque érection (***)

 

* L'absence du tonus est difficile à remarquer sur un sujet couché, mais s'observe bien chez les sujets qui dorment assis, en voyage par exemple. La tête tombe alors sur le coté (ce qui réveille en genéral le sujet au début d'un rêve). Le somnambulisme n'appartient pas au rêve, car il y a conservation du tonus musculaire. Il s'agit d'un éveil partiel survenant au cours du stade III ou IV du sommeil. Par contre, la narcolepsie-cataplexie avec chute appartient à la pathologie du rêve.

** Le ralentissement respiratoire peut parfois être si intense qu'il peut entraîner des troubles graves. Il est possible que de nombreuses morts subites du nourrisson aient lieu par arrêt respiratoire au cours du sommeil paradoxal.

*** L'érection (et son équivalent clitoridien chez la femme) est sans aucun rapport avec le contenu onirique (érotique ou non). On l'observe aussi bien chez le nourrisson que chez le vieillard. Elle se voit aussi chez le rat. Son mécanisme reste inexpliqué.

Figure 2A
Cliquer pour agrandir
Figure 2B
Cliquer pour agrandir
Figure 2C
Cliquer pour agrandir

A la recherche d'un "centre" du rêve

Puisqu'il existait donc un troisième état de vigilance, était-il possible de le relier à telle ou telle structure anatomique, ou plus simplement chaque cellule cérébrale pouvait-elle rêver ? Lorsque nous nous sommes attaqués à ce problème, entre 1959 et 1965, nous avions la chance de disposer de critères extrêmement spécifiques pour reconnaître le début du rêve. Nous en retînmes deux: la disparition du tonus musculaire (phénomène tonique) et l'apparition de l'activité PGO (phénomène phasique). D'autre part, nous savions déjà que le cortex cérébral n'était pas nécessaire à l'activité onirique. Nous avons donc cherché à délimiter quelle était la partie du tronc cérébral nécessaire et suffisante pour que s'instaure cet état. A cette fin, nous avons utilisé la méthode classique de Le Gallois et pratiqué des sections étagées successives du tronc oérébral. Nous finîmes par obtenir des animaux auxquels nous avions enlevé toutes les structures cérébrales (y compris l'hypothalamus et l'hypophyse) en avant du pont, cette structure qui relie le cerveau proprement dit au bulbe et à la moelle épinière. Ces chats continuaient pourtant à présenter des épisodes de sommeil paradoxal d'une durée de 6 minutes toutes les 25 minutes. Ces "préparations " pontiques, que nous avons appris à conserver en vie plusieurs mois, oscillent ainsi sans fin et avec la régularité d'une horloge biologique entre un état d'éveil tres archaïque et le sommeil paradoxal (fig. 3). Nous avions ainsi appris que le pont était suffisant pour que survienne le sommeil paradoxal. Etait-il intégralement nécessaire ou abritait-il une structure particulière responsable de cet état ? La réalisation de lésions bilatérales et symétriques de la partie dorso-latérale de la formation réticulée pontique nous permit alors de supprimer sélectivement et définitivement le sommeil paradoxal chez le chat, sans entraîner de troubles notables du sommeil lent. Ce résultat, pour satisfaisant qu'il fût, marquait la fin des progrès possibles par la seule méthode des lésions et des observations phénoménologiques. Rien ne nous permettait, à cette époque, de deviner quels neurones de cette partie du pont pouvaient être tenus pour responsables du sommeil paradoxal. Il apparaissait même incroyable qu'une région aussi petite du cerveau (4 mm de long sur 2 mm de large et 2 mm d'épaisseur chez le chat) puisse commander un phénomène aussi important que l'activité onirique.

En fait, la mise en évidence des structures responsables du sommeil paradoxal fut le fruit d'un dialogue permanent entre la neurophysiologie classique et la neuropharmacologie, le fossé entre les deux disciplines étant comblé peu à peu par l'histochimie. C'est ainsi qu'au moment où nous délimitions la partie dorso-latérale de la formation réticulée pontique comme structure essentielle pour le déclenchement du sommeil paradoxal, des histochimistes japonais publièrent une carte du tronc cérébral, qui montrait une grosse tache noire à cet endroit précis. Elle correspondait à l'accumulation d'enzymes responsables de la destruction des amines cérébrales (les monoamines oxydases) au niveau des noyaux locus coeruleus et subcoeruleus. Ce "complexe coeruléen" apparut dès lors comme un objectif de premier ordre. Car cette structure anatomique possédait une structure biochimique et pouvait peut-être ouvrir la porte à l'étude des mécanismes biochimiques du rêve. Si le complexe coeruléen contenait des monoamines oxydases, alors peut-être les monoamines (catécholamine ou sérotonine) pouvaient jouer un rôle dans l'apparition du rêve. La mise en jeu de neurotransmetteurs pouvait de plus expliquer un phénomène étrange: celui du rebond de sommeil paradoxal (augmentation de la durée du rêve) qui fait suite pendant des jours à sa privation sélective prolongée. La possibilité de régulation au long cours, par induction enzymatique par exemple et augmentation prolongée du "turn over" d'un système aminergique donné, rendait mieux compte de la durée du rebond que l'electrophysiologie classique qui peut difficilement expiiquer les phénomènes dépassant la seconde.

Une expérience de pharmacologie, vint enfin confirmer que la piste monoaminergique pouvait être intéressante. En effet, l'administration d'inhibiteur des monoamines oxydases apparut comme l'un des moyens les plus efficaces pour supprimer sélectivement le sommeil paradoxal (une seule injection de 10 mg/kg de nialamide peut ainsi supprimer le rêve pendant 4 à 5 jours chez un chat).

Si la piste monoaminergique s'avérait prometteuse, encore fallait-il savoir par où la prendre, et comment la suivre dans ce système de systèmes qu'est le cerveau. Ce furent les travaux de l'équipe du Karolinska Institut à Stockholm avec N. Hillarp. B. Falk. Anika Dahlstrom et Kjell Fuxe qui rendirent possible cette étape, en délimitant grâce à l'histofluorescence la topographie des systèmes catécholaminergiques et sérotoninergiques cérébraux (fig. 4).

Ainsi, grâce à l'histofluorescence, se trouvent mis en place des systèmes de neurones possédant des caractéristiques histochimiques spécifiques et doués de la propriété très intéressante de pouvoir agir au niveau de nombreuses structures en même temps (puis qu'un seul corps cellulaire est capable d'innerver monosynaptiquement des neurones mésencephaliques, cérébelleux, corticaux et même médullaires). Il est enfin possible, bien que pas encore prouvé de facon définitive, que ces systèmes puissent se contrôler mutuellement. Par exemple des terminales catecholaminergiques sont situées au niveau des perikarya sérotoninergiques. On concoit ainsi combien ces systèmes sont particulièrement adaptés pour assurer la régulation des états de vigilance. Pendant que se déroulait l'étape neuroanatomique indispensable à l'étude des systèmes monoaminergiques, la neurophysiologie avait acquis de son côté des résultats qui lui permettaient de passer à un début d'étude biochimique des mécanismes du rêve. De nombreux enregistrements éffectués aussi bien en Europe qu'aux Etats-Unis devaient convaincre les chercheurs que les quantités de sommeil et de rêve constituaient une constante biologique remarquablement stable pour chaque espèce. La quantité d'éveil, de sommeil et de rêve devenait donc une variable dépendante susceptible d'être mise en corrélation avec les manipulations pharmacologiques ou chirurgicales d'un système monoaminergique donné. On pouvait ainsi étudier le retenfissement de l'inhibition de la synthèse des catécholamines ou de la sérotonine (objectivé par des dosages biochimiques in vivo ou post mortem, ou par l'histofluorescence) sur les états de vigilance. Il devenait même possible d'inactiver localement des groupes cellulaires monoaminergiques soit par coagulation, soit plus récemment grâce à l'injection in situ de poisons spécifiques des catécholamines comme la 6 hydroxy-dopamine, ou de la sérotonine comme la 5-6 hydroxytryptamine. Avec cette dernière méthode, il devint alors possible d'étudier les corrélations multiples entre l'intensité de l'atteinte d'un groupe cellulaire donné (objectivée par des techniques quantitatives de topométrie), l'intensité de l'inactivation du neurotransmetteur au niveau de son système terminal (et parfois de l'activation secondaire du système monoaminergique antagoniste) mesurée par la détermination du neurotransmetteur (et de ses métabolites) au niveau des structures nerveuses contenant les terminales, et enfin la quantité de sommeil et de rêve.

De ces expériences est né un modèle qui rend compte, encore imparfaitement, des phénomènes biochimiques conduisant à l'arrivée du rêve.

Figure 3A
Cliquer pour agrandir
Figure 3B
Cliquer pour agrandir
Figure 3E
Cliquer pour agrandir
Figure 3F
Cliquer pour agrandir
Figure 4
Cliquer pour agrandir

La régulation biochimique du cycle veille-sommeil

L'éveil. Le rôle de la noradrénaline (issue de la partie rostrale du com plexe coeruléen) dans l'entretien de l'éveil cortical (et peut-être de certains types d'apprentissage) est fortement suggéré par les expériences suivantes : l'inhibition de la synthèse des catecholamines grâce à l'alpha méthyltyrosine (qui inhibe la tyrosine hydroxylase) conduit à une diminution considérable de l'éveil cortical et comportemental. Le même résultat est entraîné par des lésions du faisceau noradrenergique dorsal. Il existe ainsi bonne corrélation entre la diminution de l'éveil et la diminution de la noradrénaline cérébrale.

Le sommeil. Le rôle du système sérotoninergique dans l'endormissement est maintenant bien établi par les expériences suivantes: l'inhibition la synthèse de la sérotonine par p. chlorophénylalanine (qui inhibe tryptophane hydroxylase) produit une insomnie quasi totale (et également une suppression du sommeil paradoxal. Cependant, si l'on court-circuite l'étape de blocage de la p. chlorophénylanine en injectant de faibles doses 5-hydroxy-tryptophane, le précurseur direct de la sérotonine (qui traverse barrière hémato-méningée), on peut rétablir immediatement un sommeil normal qui conduit au sommeil paradoxal. Ce sont les neurones contenus da la partie rostrale du système du raphé qui semblent jouer le rôle le plus important, comme en témoigne l'insomnie totale obtenue par destruction des noyaux centralis superior et raphé dorsalis. Dans ce cas, il existe une correlation très étroite entre l'intensité, l'insomnie, la diminution de sérotonine, au niveau des terminales et la quantité de corps cellulaires détruite par la lésion. Des résultats comparables ont été obtenus récemment en "empoisonnant" sélectivement les neurones sérotoninergiques avec la 5-6 HT.

Il apparaît donc qu'éveil et sommeil sont sous la dépendance de deux systèmes antagonistes, et, comme on pouvait s'y attendre, des régulations complexes semblent s'effectuer entre ces deux systèmes.

Ainsi l'inactivation des neurones noradrenergiques, dont les axones empruntent le faisceau dorsal noradrénergique, entraîne bien un diminution de l'éveil mais en même temps elle entrame une activation des neurones sérotoninergiques (qui s'objective par une augmentation de la synthèse de sérotonine et de son "turn over". Cela conduit donc à une augmentation sommeil et, par conséquence, du rêve. Dans certains cas, l'augmentation du rêve devient considérable (plus 600 minutes par jour au lieu de 200). Inversement, l'inactivation des neurones sérotoninergiques (par destruction du système du raphé par exemple) entraîne l'activation des neurones catécholaminergiques responsables de l'éveil. On conçoit ainsi que l'insomnie puisse avoir plusieurs mécanismes (que l'on retrouve en clinique humaine, et qui conditionnent son traitement) soit par activation de certains neurones catécholaminergiques, soit par inactivation des neurones sérotoninergiques, soit les deux à la fois. De même l'éveil pourra être diminué de deux façons : soit par inactivation isolée des neurones catécholaminergiques; il s'agit alors d'un a-éveil (augmentation sur tout du stade I du sommeil) plus que de véritable sommeil, et le rêve est en général diminue; soit par activation du système sérotoninergique; dans ce cas, il s'agit bien de véritable hypersomnie (avec augmentation harmonieuse des stades III et IV et du rêve).

Figure 5A
Cliquer pour agrandir
Figure 5B
Cliquer pour agrandir
Figure 5C
Cliquer pour agrandir

Un orage cérébral

Très schématiquement, les mécanismes du rêve peuvent être décomposés en quatre éléments principaux. Le premier est capItal., car il explique les trois autres. Il est caractérisé par un état d'excitation intense de la majorité des neurones cérébraux, y compris les neurones moteurs. Un tel état d'excitation généralisée d'origine endogène nécessite d'une part l'existence d'un "pace maker" et d'autre part d'un mécanisme de blocage des efférences motrices: Nous rêvons que nous courons mais notre corps reste inerte car il est paralysé. Enfin une telle paralysie ne peut survenir qu'au cours du sommeil.

Le rêve s'accompagne donc d'un état d'excitation centrale très important, un veritable orage cérébral, au cours duquel des enregistrements par micro électrodes démontrent que les cellules nerveuses présentent une excitation analogue à l'état d'éveil le plus intense. Les neurones cérébraux dans leur majorité (70 à 80 %) sont alors soumis au rythme de l'activité PGO qui dépend du "pace maker" situé au niveau de la partie dorso-latérale du tegmentum pontique comprenant le complexe des noyaux locus coeruleus et subcoeruleus riches en neurones catécholaminergiques et cholinergiques. Les neurones moteurs oculaires sont les seuls à déclencher une activité musculaire en réponse à l'activité PGO. Cependant, les neurones moteurs pyramidaux et extrapyramidaux n'échappent pas à l'influence excitatrice de ce "pace maker", comme le démontre l'intense activité unItal.re recueillie au niveau du faisceau pyramidal ou au niveau de certains relais extrapyramidaux comme le noyau rouge. On conçoit alors que deux mécanismes aient été développés au cours de l'évolution pour que l'activité onirique puisse apparaître : un mécanisme de blocage des efférences motrices et l'étape préparatoire du sommeil lent.

Le mécanisme très puissant de blocage des efférences motrices s'exerce au niveau de la voie finale commune (motoneurones spinaux). Ce mécanisme déclenché par la région caudale du complexe des noyaux locus coeruleus et subcoeruleus commande ainsi l'atonie totale des muscles selon des mécanismes complexes encore mal élucidés. Ainsi l'activation même la plus intense des neurones pyramidaux ou extrapyramidaux ne peut entraîner de mouvement (mis à part les mouvements oculaires et quelques décharges phasiques des muscles distaux) et ne risque pas de déplacer ou de réveiller le rêveur. Les neurones responsables du mécanisme de blocage sont très proches mais cependant distincts des neurones responsables des processus d'excitation interne du cerveau au cours du sommeil paradoxal. Cette disposition permet leur destruction sélective (fig. 6).

Ainsi, si la connaissance et l'analyse du contenu subjectif des rêves des chats nous sont à jamais interdits, il est devenu maintenant possible de démasquer et d'étudier objectivement le comportement "onirique" d'un chat. En effet, si l'on supprime sélectivement le mécanisme d'inhibition active qui s'exerce sur les efférences motrices, par des lésions électrolytiques de la région caudale du complexe des noyaux locus c&brkbar;ruleus, rien n'empêche plus alors l'extériorisation motrice du rêve. On assiste alors, périodiquement au cours du sommeil, à des épisodes spectaculaires. Les chats présentent pendant quelques minutes des comportements de type hallucinatoire. Ils chassent des souris ou se défendent contre des prédateurs imaginaires. Rage, agression, défense, tel est le répertoire onirique habituel du chat. Il ne peut s'agir d'éveil car les signes oculaires (myosis intense et rétraction des membranes nictitantes) sont pathognomoniques du sommeil profond ou du sommeil paradoxal. En outre, les animaux ne réagissent pas aux stimuli visuels ou auditifs qui leur sont présentés. Enfin ces épisodes sont supprimés par les mêmes drogues qui suppriment le sommeil paradoxal (comme les inhibiteurs des monoaminoxydases). Ces comportements stéréotypés d'une durée de 5 à 6 minutes se terminent en général par un éveil brusque, caractérisé par une subite dilatation pupillaire, et le retour secondaire au calme de l'animal, qui se rendort. Si l'on admet que ces comportements représentent l'expression motrice de l'excitation des systèmes pyramidaux et extrapyramidaux par le "pace maker" pontique, on doit penser que cette stimulation endogène ne met pas en jeu au hasard des circuits neuroniques et que cette excitation traduit donc l'expression d'un programme, d'un projet sinon d'un instinct.

Figure 6A
Cliquer pour agrandir
Figure 6B
Cliquer pour agrandir
Figure 6C
Cliquer pour agrandir
Figure 6D
Cliquer pour agrandir
Figure 6E
Cliquer pour agrandir

L'histoire naturelle du rêve

On conçoit que la paralysie totale périodique accompagnée d'élévation importante du seuil d'éveil ne puisse apparaltre qu'au cours du sommeil. En effet, que signifie le sommeil ? Sur le plan éco-éthologique, cela signifie "non danger". Les animaux dorment dans leur territoire à un endroit où ils ne risquent pas d'être attaqués (c'est le cas, par exemple, des arbres à sommeil des babouins en Afrique). Sur le plan neurophysiologique, le sommeil signifie également l'absence d'excitation du système d'éveil par les télérécepteurs (ouie, odorat) et évidemment par les propriocepteurs (douleur) : absence d'aboiement ou d'odeur de chien pour le lièvre par exemple. C'est donc seulement quand apparait le signal biologique "sommeil profond", donc de "sécurité" que les processus du rêve peuvent être déclenchés à partir de la formation réticulée pontique. Car, contrairement à ce qu'a écrit Freud, le rêve n'est pas le gardien du sommeil. C'est au contraire le moment le plus dangereux qui soit pour un animal, car son seuil d'éveil est alors augmenté, et il est paralysé. Il est téléologiquement inconcevable que le rêve puisse apparaître au cours de l'éveil. Aucune espèce animale (sauf l'opossum, qui semble avoir "inventé" la feinte de faire le mort en cas de danger) n'aurait pu survivre à la paralysie périodique du rêve si celle-ci était survenue à l'instant de la fuite ou de l'attaque. Il n'y a que chez l'embryon de poulet in ovo, le foetus in utero ou chez le nouveau-né "nidicole" que le rêve puisse survenir brusquement en plein éveil. Dans ce cas, le signal biologique de sécurité est apporté par l'environnement maternel. Ainsi chez l'organisme adulte, le sommeil constitue à la fois l'étape préparatoire et déclenchante du rêve. On peut ainsi supposer que l'étape sérotoninergique du sommeil joue un double rôle. En un premier temps, correspondant aux différents stades de sommeil lent, doivent s'effectuer de processus de "restauration" hypothétique à l'échelon synaptique ou à l'intérieur des périkarya. Ces processus viennent sans doute réparer le "fatigues" de l'éveil selon quelque "deuxième messager intracellulaire que nous ignorons encore. Ce n'est que lorsque cette étape est franchie que les signaux sérotoninergiques déclenchent la mise en jeu des mécanismes exécutifs situés au niveau du pont. Le bombardement endogène, de nos synapses centrales par le "pace maker" pontique s'effectue ainsi sur un système nerveux reposé des fatigues de l'éveil et sans doute préparé à recevoir de nouveaux messages. Rêve et sommeil apparaissent donc étroitement liés entre eux. L'étude de leur évolution ontogénétique et phylogénétique nous apporte des renseignements complémentaires capitaux sur cette dépendance.

Tard venue au cours de l'évolution phylogénique, tôt venue au cours de l'ontogénèse, l'activité onirique garde le secret du pourquoi de son apparition.

Le rêve apparaît en effet tardivement au cours de l'évolution phylogénétique. Il n'est pas possible, en effet, de repérer les critères classiques du sommeil paradoxal chez des poissons comme la tanche, des amphibiens (grenouilles, crapauds) et des reptiles (iguane, python, tortue, caïman). Il est cependant relativement facile d'objectiver l'alternance activité-repos chez les vertébrés inférieurs, bien que l'activité électrique cérébrale des poissons, des amphibiens ou des reptiles soit monotone et ne subisse pas ou peu de variation avec les niveaux d'activité. Ainsi, chez les poïkilothermes, la nature n'aurait pas eu besoin d'"inventer " le sommeil paradoxal. Par contre ils semble qu'avec l'apparition de l'homéothermie apparaisse le sommeil paradoxal. C'est le cas des oiseaux (poussin, poule, pigeon, chouette, aigle), et de tous les mammifères étudiés jusqu'à présent (de l'opossum à l'éléphant). Des différences considérables quantitatives existent cependant entre chaque espèce. Dans la plupart des cas, ces différences sont assez aisément explicables si l'on se rappelle l'importance du facteur sommeil et donc sécurité dans le déclenchement du rêve. Les "petits rêveurs" (10 à 15 minutes par jour) occupent un temps considérable de leur nycthémère à rester éveillé pour trouver et absorber une nourriture peu énergétique à base de cellulose (herbivores, rongeurs...). Il ne reste donc que peu de place pour le sommeil et surtout pour un sommeil profond chez ces espèces constamment chassées. La plupart des "gros rêveurs" sont des carnivores qui peuvent résoudre leur problème énergétique assez rapidement aux depens des herbivores ou des rongeurs. En outre, les carnivores dorment en général en sécurite. Cette sécurité atteint son maximum chez les animaux domestiques. Ainsi, par chance pour le neurophysiologiste, le chat domestique apparaît comme le champion des rêveurs, avec 200 minutes environ par jour. Tel est le bilan actuel de l'étude de l'évolution phylogénétique du rêve. Il semble s'en dégager une certaine tendance: la complexification du système nerveux s'accompagne généralement d'une élévation de la durée du rêve (en valeur absolue ou en valeur relative par rapport au sommeil). L'importance des facteurs écoéthologiques rend cependant illusoire tout essai de corrélation entre la durée du sommeil paradoxal et les performances de l'activité nerveuse supérieure de divers genres ou espèces. Le chat et l'opossum rêvent plus que le chimpanzé et l'homme, mais leur performance dans certains types d'apprentissage est des plus médiocres.

Les données de l'évolution ontogénétique nous apportent un enseignement capItal., qui doit servir de base à toute théorie neurobiologique de l'activité onirique. Chez les mammifères (et probablement aussi chez les oiseaux), la quantité de sommeil paradoxal est étroitement liée au niveau de maturation du système nerveux central. Ainsi le raton (nidicole), qui naît avec un système nerveux très immature, présente un taux élevé de sommeil paradoxal au cours de la première semaine post-natale (70 à 80 % du nycthémère). Le raton ou le chaton nouveau-né, dans la sécurité de la chaleur maternelle, oscille ainsi continuellement entre l'éveil et le sommeil paradoxal. Le sommeil "orthodoxe" ne fait son apparition que vers la fin de la première semaine. Au fur et à mesure de la maturation du cerveau et de l'achèvement des processus de myélinisation, le taux de sommeil paradoxal diminue et rejoint celui de l'adulte (10 % du nycthémère). De son côté, le cobaye (nidifuge et rongeur) possède un cerveau dont la maturation est achevée à la naissance. Son taux de sommeil paradoxal est alors presque comparable à celui de l'adulte (et relativement bas, 5 à 7 %). Cependant, si l'on enregistre des cobayes in utero au moment où leur état de développement cérébral est analogue au raton nouveau-né (au 40e jour après la conception, soit 20 jours avant leur naissance), on constate un taux de sommeil paradoxal simiilaire à celui des ratons nouveau-nés (70 à 80 %).

Le taux de sommeil paradoxal apparaît donc comme un indice fonctionnel relativement sûr d'un certain niveau dynamique de maturation cérébrale (1). C'est sans doute au moment où s'effectuent ies processus de mise en place des systèmes les plus complexes (achèvement du manteau cortical par exemple) que prédomine le sommeil paradoxal. L'augmentation considérable du SP in utero ou à la naissance nous oblige donc à admettre que c'est au moment où les facteurs génétiques l'emportent sur les événements épigénétiques que le SP constitue la presque totalité de l'activité cérébrale en dehors de l'éveil (fig. 7).

(1) D. Jouvet Mounier, Thèse de sciences, Lyon, 1968.

Figure 7
Cliquer pour agrandir

Le rêve - Les fonctions du rêve

Nous allons nous efforcer de ras sembler des faits exposés ci-dessus pour essayer d'en dégager un dénominateur commun possible qui puisse servir de guide dans la recherche des fonctions du rêve. Un tel essai est difficile, sinon téméraire, car les nombreuses théories qui ont vu le jour depuis l'entrée du rêve dans le domaine de la neurobiologie n'ont pas encore reçu de confirmation expérimentale. Ces théories (2) font jouer au rêve soit un rôle spécifique dans les mécanismes de la vision binoculaire, de la mémoire ou de l'apprentissage, soit un rôle non spécifique d' "homéo stasie corticate" ou de stimulation endogène au cours de l'ontogénèse: l'activation des neurones au cours du sommeil paradoxal entretiendrait alors la valeur fonctionnelle des systèmes qui ne sont pas soumis à la stimulation des récepteurs au cours de la période pré- et post-natale (le système visuel par exemple).

Cette dernière théorie, élaborée par Roffwarg, Muzio et Dement (1966), a le mérite d'insister sur la prédominance du sommeil paradoxal au cours de l'ontogénèse. Elle se heurte cependant à certains résultats expérimentaux. Il est vrai qu'à la naissance le système visuel apparaît fonctionnel (en ce sens qu'une réponse corticale peut être obtenue en court-circuitant l'étape ré tinienne par la stimulation du nerf optique). Il semble cependant prouvé que les stimulations endogènes qui envahissent le système visuel (noyau genouille latéral et cortex occipItal.) au cours du sommeil paradoxal à partir du 15e jour post-natal (et qui sont représentées en partie par l'activité PGO d'origine pontique) ne sont pas sutfisantes pour entretenir un fonctionnement normal de la vision au cours de la période post-natale. Le système visuel nécessite en effet des stimulations lumineuses pour fonctionner: ainsi l'absence de vision à la naissance, obtenue en fermant les paupières des chatons, entraîne secondairement une diminution des épines dendritiques de certaines couches de l'écorce et une altération définitive et irréversible des réponses électriques du cortex occipItal. (3) La réouverture des yeux après un certain âge critique n'empêche pas alors des troubles définitifs de la vision. Il ne semble donc pas que le sommeil paradoxal joue un rôle de stimulation suffisante dans l'entretien fonctionnel de certains systèmes.

(2) E. Hennevin, P. Leconte, annee psychol., 2, 489, 1971.

(3) T. Wisel et D. Hubel, J. Neurophysiol., 28, 1029, 1965.

Le rêve, programmation génétique des instincts ?

Il faut donc supposer qu'il existerait deux types de neurones au sein du système nerveux central... Les uns apparaissent précocement et sont soumis à un programme génétique extrêmement strict. Par exemple la construction du système visuel s'effectue par induction séquentielle de neurones capables d'aller trouver leur but au niveau du tectum malgré la rotation de l'oeil chez l'amphibien. Dans de tels systèmes, le génome contient à la fois la spécification de l'organisation (ou de la réorganisation après section de l'axone dans le cas des poïkilothermes). Ces systèmes de neurones nécessitent ensuite des stimulations externes épigénétiques pour fonctionner chez les homéothermes.

Il faut admettre qu'il existe chez les homéothermes d'autres systèmes de neurones qui apparaissent plus tard au cours de la maturation cerébrale et dont la spécification et les connexions peuvent être modifiées. Il apparaît logique que ces neurones soient mis en place vers la fin de l'ontogénèse au cours du sommeil paradoxal.

Tout se passe comme si, à un moment donné du développement du cerveau, l'organisation de tels systèmes nécessitait une activation par un "pace maker" endogène. Cette activation pourrait être représentée par l'activité PGO du sommeil paradoxal, issu du "pace maker" pontique.

Les systèmes de neurones qui sont soumis à une telle stimulation endogène sont en relation étroite avec les neurones moteurs. On est même en droit de supposer que la stimulation endogène est responsable de l'apparition d'un véritable répertoire de comportements génétiquement programmés. En témoignent les périodes de comportement stéréotypé d'agression ou de défense qui apparaissent au cours du sommeil paradoxal chez les chats dont les mécanismes d'inhibition centrale au niveau des motoneurones ont été détruits.

Le rêve constituerait ainsi une répétition in utero ou pendant le sommeil des nombreux mécanismes intégratifs et moteurs qui sous-tendent ensuite les comportements innés (ou instinctuels), qui apparaissent à chaque étape du développement de l'individu : comportement post-natal (recherche de la nourriture), répertoire du chant des oiseaux chez qui ce répertoire est inné, comportement d'agression, de défense du territoire, de marquage du territoire, comportement sexuel, etc. Le rôle du rêve (ou du sommeil paradoxal) serait ainsi de préparer, d'organiser et de programmer les séquences motrices selon les étapes du développement historique du système nerveux afin que celles-ci soient parfaitement au point lorsque les conditions du milieu extérieur et intérieur sont adéquates. En somme, le rêve représenterait au niveau de l'organisation motrice des comportements innés ce que les événements épigénétiques sont pour la maturation des systèmes sensoriels. On comprend que le sommeil paradoxal constitue le cadre idéal pour qu'une telle programmation genétique ait lieu. D'abord ce phénomène est presque permanent in utero, au moment de la maturation des structures les plus complexes du système nerveux et de la mise en place, sinon de l'essai, des programmes genétiques qui devront être utilisés à la naissance. Dans la période post-natale et même chez l'adulte, compte tenu des modifications plastiques importantes entraînées par l'apprentissage au niveau des synapses et du rôle de certaines glandes endocrines dans la modification du génome, on conçoit qu'il soit nécessaire qu'une organisation ou une réorganisation des programmes instinctuels complexes ait lieu. Il est évident que cette réorganisation génétique qui met en jeu les motoneurones ne peut s'effectuer alors qu'en circuit fermé, afférences et efférences bloquées et au cours du sommeil. Il apparait en effet logiquement impossible qu'une telle programmation puisse s'effectuer au cours de l'éveil, alors que la majorité des neurones moteurs et des circuits intégratifs corticaux sont soumis à l'influence des événements épigénétiques.

Rêve et plasticité

Nous avons résumé plus haut le rôle important que jouent les systèmes monoaminergiques dans l'organisation du cycle sommeil-rêve: les neurones catecholaminergiques (et peut-être cholinergiques) étant responsables de la plupart des phénomènes du sommeil paradoxal. Ces systèmes apparaissent particulièrement adaptés à l'établissement ou à la programmation de certaines nouvelles connexions: en effet, au cours de la maturation in utero chez le cobaye, les systèmes sérotoninergiques, puis catécholaminergiques, se différencient histochimiquement quelques jours avant l'apparition du sommeil paradoxal. D'autre part, les systèmes monoaminergiques semblent doués, même chez l'adulte, d'une considérable capacité de régénérescence et de plasticité au point qu'ils semblent se comporter comme des neurones de poïkilothermes. En effet, la section d'un faisceau monoaminergique chez le chat entraîne d'abord une dégénérescence en aval de la lésion. Ensuite, après 8 à 10 jours, il se produit des bourgeonnements (sprouting), et les neurones contournent la lésion et reviennent innerver à nouveau les structures nerveuses situées en aval.

Dans certains cas, enfin, les signaux biochimiques qui attirent les neurones monoaminergiques viennent du système nerveux lui-même: c'est ainsi que la dénervation des noyaux du septum (par section homolatérale du fornix) est suivie par l'apparition de nouvelles terminales noradrénergiques qui semblent prendre la place des terminales degénérées (4).

On peut supposer que ce dernier exemple n'est qu'une caricature (objectivée par les méthodes histochimiques) de ce qui pourrait se passer lors de l'interaction environnement - génome. Dans ce cas, le signal biochimique pourrait être constitué par des modifications synaptiques déclenchées auparavant au cours de l'éveil par un événement épigénétique donné. Ces modifications subiraient l'action "restauratrice" du sommeil et induiraient par chemotaxie l'arrivée de terminales monoaminergiques. L'arrivée de ces nouvelles synapses est la condition obligatoire pour que le nouvel ensemble fonctionnel ainsi réalisé soit soumis à la programmation génétique qui aurait lieu au cours de l'activité onirique.

Finalement, il n'apparaît pas totale ment impossible de vérifier si le répertoire génétique de l'activité onirique peut être modifié par l'environnement.

Il est possible en effet d'élever des chatons dans un isolement sensoriel total sans aucun contact avec leurs congénères. Il est peu probable que ces animaux présentent à l'état de veille un comportement d'agression ou de défense en l'absence de tout stimulus. Si à l'âge adulte, après destruction de la région de la formation réticulée pontique qui commande l'inhibition motrice au cours du sommeil paradoxal, ces animaux présentent des comportements oniriques périodiques stéréotypés de rage ou de défense identiques à des animaux élevés "en société", il deviendra alors fort probable que le rêve est bien l'expression de mécanismes génétiques préprogrammés et immuables et que l'inné l'emporte sur l'acquis. Dans le cas contraire, on sera amené à considérer la possibilité de l'intervention de facteur épigénétique qui pourrait à certaines périodes critiques agir sur le génome. Nous savons que cela est possible avec les hormones puisque l'injection d'hormone mâle au cours de la période post-natale induit chez une rate femelle un comportement sexuel mâle. Pourquoi ne pas admettre que des signaux biochimiques, issus de certains neurones mono-aminergiques puissent également agir, au cours du rêve, sur le génome au niveau des étapes de translation, transcription ou d'activité enzymatique, etc. ?

(4) Katzman et al., Brain Research, 579. 1971

La privation de rêve

On peut supprimer le rêve en éveillant un animal (ou un sujet humain) au début de chaque période de sommeil paradoxal. Une telle méthode instrumentale nous a appris que des privations de longue durée pouvaient être relativement bien supportées. On sait maintenant que les privations instrumentales s'accompagnent de quelques troubles non spécifiques du comportement et, d'autre part, du phénomène de rebond de rêve (c'est-à-dire de l'augmentation transitoire du rêve après sa suppression).

On peut maintenant (et on est amené à le faire dans le traitement de certaines narcolepsies) supprimer sélectivement l'activité onirique pendant des semaines sinon des mois, chez l'homme adulte par des drogues agissant sur le métabolisme des amines cérébrales. Dans certains cas, ces privations ne sont pas suivies de rebond, et aucun trouble important du comportement, de la mémoire, de l'intelligence ou de l'apprentissage n'a encore pu être mis en évidence. Nous avons eu récemment l'occasion d'observer un malade atteint de chorée fibrillaire de Morvan chez qui plus de 100 enregistrements polygraphiques de sommeil nous ont prouvé qu'il ne présentait pas de sommeil paradoxal pendant plus de quatre mois. Chez ce malade, qui présentait en outre une insomnie presque totale, il fut impossible de déceler des troubles de la memoire ou de l'apprentissage. Le seul signe anormal était constitué par des hallucinations spectaculaires interrompant le début de ces nuits sans sommeil. Même s'il est possible que le sommeil joue un rôle favorisant dans la mémoire épigénétique et l'apprentissage, c'est sans doute au niveau de la mémoire de l'espèce, et donc la programmation des instincts qu'il faut rechercher les fonctions du rêve. L'absence de trouble évident et spécifique après privation instrumen tale pharmacologique ou pathologique de quelques semaines ou quelques mois de sommeil paradoxal est une énigme pour la plupart des théories du rêve. En fait, si le rêve constitue le moment privilégié de l'interaction entre les événements épigénétiques et des schèmes génétiquement programmés de comportements instinctuels, il y a peu de chance que des troubles spectaculaires apparaissent chez l'individu adulte. L'homme privé pharmacologiquement de rêve vit souvent en milieu hospItal.ier, et il continue rarement sa vie dans son univers familier. On a tendance alors à mettre sur le compte des drogues ou de l'environ nement hospItal.ier les changements de personnalité (variation de l'agressivité ou de la sexualité) qui surviennent. En fait, dans la vie quotidienne de l'homme moderne, les schèmes génétique ment programmés, dont les éthologistes commencent seulement le recensement, font le plus souvent place à des comportements acquis socio-culturellement.

Par contre, il est fort probable, st évidemment crucial pour cette théorie, que des troubles importants devraient apparaître lorsque la suppression du rêve est provoquée au moment où s'effectue la plus grande partie de la programmation génétique. C'est-à-dire in utero, ou immédiatement dans la période post-natale. Jusqu'à présent, cependant, il a été impossible de faire vivre suffisamment longtemps des ratons privés de rêve par des moyens pharmacologiques ou instrumentaux immédiatement après la naissance. Ainsi le rêve garde encore le secret de ses fonctions et peut-être le gardera-t-il encore longtemps. Un fait est certain cependant : nous ne pourrons pas expliquer de façon satisfaisante le fonctionnement de notre cerveau tant que nous n'aurons pas compris le pourquoi de nos 100 minutes nocturnes de rêve.

Pour en savoir plus

Sur les mécanismes neurophysiologiques et biochimiques du sommeil et du rêve, voir:

  • G. Moruzzi
    "The sleep-waking cycle", Ergebnisse der Physiologie, 64, 2, 1972.
  • M. Jouvet
    "The role of monoamine and acetylcholine containing neurons in the regulation of the sleep-waking cycle", Ergebnisse der Physiologie, 64, 165, 1972.

Voir également:

  • M. Jouvet (ed.)
    Neurophysiologie des états de sommeil Colloques internationaux du CNPS, 657 p., CNRS, 1965.
  • A. Kales (ed.)
    Sleep, Physiology and Pathology, 360 p., Lippincott, Philadelphie, 1969.
  • E. Hartmann
    Biologie du rêve, 358 p., Dessart, Bruxelles, 1970.
  • Le sommeil de nuit normal et pathologique
    391 p., Masson, 1964.
  • A. Sourguignon
    "Neurophysiologie du rêve et théorie psychanalytique", Psychiatrie de l'enlant, Xl, PUF, 1968.

Figure 1a : L'utilisatlon d'électrodes implantées à demeure...

...permet d'enregistrer en continu les événements électriques survenant au cours du nycthémère tant dans le cerveau (cortex cerébral corps genouillé et pont en particulier) que dans les muscles de la nuque. On enregistre d'autre part les mouvements des yeux grâce à des électrodes placées de part et d'autre des orbites.

Figure 1 B : La polygraphie ainsi obtenue...

...révèle l'existence de trois types de tracés correspondant à trois comportements différents et définissant les trois états.

a - L'animal est éveillé. La tête levée regarde autour de lui. Cela se traduit par de nombreux mouvements oculaires et une importante activité musculaire au niveau de la nuque. En même temps, l'activité corticale est rapide et de bas voltage et l'on remarque une activité évoquée discrète au niveau du noyau genouillé latéral c'est-à-dire du relais visuel du thalamus. Cette activité, contemporaine des mouvements oculaires, traduit l'un des nombreux aspects de l'entrée des informations visuelles dans le système nerveux central.

b - L'animal est endormi. Il n'y a plus aucun mouvement oculaire. L'activité de la nuque a diminué sans pour autant disparaître car le chat a une posture de sommeil au cours de laquelle il existe un certain tonus musculaire. Enfin, il existe une activité corticale plus lente et dont le voltage s'est nettement accru tandis qu'il n y a pas d activité particulière au niveau du noyau genouillé lateral.

c - Le sommeil paradoxal se signale enfin par deux types de phénomènes nouveaux, les uns toniques, les autres phasiques. Les signes toniques sont d'une part, l'apparition au niveau cérebral d'une activité raplde et de bas voltage presque identique à celle de l'état d éveil et d'autre part la disparition totale du tonus musculaire. Les signes phasiques sont caractérisés par l'apparition de "pointes" de haut voltage dans certaines structures cérébrales et plus particulièrement au niveau du pont, du noyau genouillé et du cortex occipItal. (activité PGO) et des phénomènes périphériques tels que d'importants mouvements oculaires.

Figure 2 A : La polygraphie nocturne du sommeil...

...s'effectue en enregistrant l'électroencephalogramme par des électrodes collées sur le scalp. Les mouvements oculaires sont enregistrés par des électrodes placees de part et d'autre des yeux, tandis que le tonus musculaire est enregistré au niveau de la houppe du menton (2 A).

Figure 2 B : Plusieurs types d'activité électrique...

...caractérisent le sommeil, tandis que le rêve s'accompagne des mêmes caracteristiques que chez le chat : activité corticale rapide, mouvements oculaires, absence de tonus musculaire (2 B).

Figure 2 C : Le cycle sommeil-rêve, analysé visuellement...

... est objectivé ensuite sur un hypnogramme (celui-ci est l'hypnogramme d'une jeune femme de 24 ans). Ainsi peuvent être quantitiées les différentes variables du sommell (2 C) Il devient possible actuellement de remplacer l'analyse visuelle par des analyses de fréquence sur ordinateur.

Figure 3 A : Le pont suffit au sommeil paradoxal

Après ablation totale du cerveau en avant du pont (3 A), l'animal présente, à l'état de veille la rigidité de décérébration décrite par Sherrington (3 B). En même temps, l'enregistrement polygraphique révèle une importante activite musculaire au niveau de la nuque (3 E). Chez ces préparations, le sommeil paradoxal apparaît regulièrement toutes les 25 minutes. Il se caractérise par une atonie totale (3 C et 3 D), par la disparition totale de l'activité musculaire, l'apparition de pointes PG0 au niveau du pont et par des mouvements oculaires (3 F).

Figure 3 B : Le pont suffit au sommeil paradoxal

Après ablation totale du cerveau en avant du pont (3 A), l'animal présente, à l'état de veille la rigidité de décérébration décrite par Sherrington (3 B). En même temps, l'enregistrement polygraphique révèle une importante activite musculaire au niveau de la nuque (3 E). Chez ces préparations, le sommeil paradoxal apparaît regulièrement toutes les 25 minutes. Il se caractérise par une atonie totale (3 C et 3 D), par la disparition totale de l'activité musculaire, l'apparition de pointes PG0 au niveau du pont et par des mouvements oculaires (3 F).

Figure 3 E : Le pont suffit au sommeil paradoxal

Après ablation totale du cerveau en avant du pont (3 A), l'animal présente, à l'état de veille la rigidité de décérébration décrite par Sherrington (3 B). En même temps, l'enregistrement polygraphique révèle une importante activite musculaire au niveau de la nuque (3 E). Chez ces préparations, le sommeil paradoxal apparaît regulièrement toutes les 25 minutes. Il se caractérise par une atonie totale (3 C et 3 D), par la disparition totale de l'activité musculaire, l'apparition de pointes PG0 au niveau du pont et par des mouvements oculaires (3 F).

Figure 3 F : Le pont suffit au sommeil paradoxal

Après ablation totale du cerveau en avant du pont (3 A), l'animal présente, à l'état de veille la rigidité de décérébration décrite par Sherrington (3 B). En même temps, l'enregistrement polygraphique révèle une importante activite musculaire au niveau de la nuque (3 E). Chez ces préparations, le sommeil paradoxal apparaît regulièrement toutes les 25 minutes. Il se caractérise par une atonie totale (3 C et 3 D), par la disparition totale de l'activité musculaire, l'apparition de pointes PG0 au niveau du pont et par des mouvements oculaires (3 F).

Figure 4 : Organisation anatomique des systèmes monoaminergiques

  1. Raphé antérieur responsable du sommeil (flèches).
  2. Raphé intermédiaire, déclenche le rêve en mettant en jeu le locus coeruleus (flèche)
  3. Locus coeruleus, partie rostrale.
  4. Locus coeruleus. partie caudale.
  5. Locus subcoeruleus, commande le sommeil paradoxal
  6. Faisceau dorsal noradrenergique, responsable de l'éveil.
  7. Faisceau descendant, commande l'inhibition du tonus au cours du rêve.
  8. Système dopaminergique nigro-striatal.

Organisation anatomique des systèmes monoaminergiques. Les corps cellulaires contenant de la sérotonine (doués d'une fluorescence jaune) sont presque tous situés au niveau du système du raphé qui occupe la partie médiane du tronc cérébral (bulbe pont mésencéphale). Ces neurones innervent aussi bien la moelle (à partir du bulbe) que le cerveau au moyen d'axones pourvus de très nombreuses varicosités ou de terminales situées au niveau de la formation réticulée mésencéphalique de l'hypothalamus de la région préoptique et du cortex cérébral. Les corps cellulaires contenant de la dopamine (doués d une fluorescence verte) sont situés en majeure partie au niveau de la substantia nigra et leurs axones se terminent au niveau des corps striés. Ainsi est constitué le système dopaminerglque nigrostriatal. Les corps cellulalres contenant de la noradrénaline et peut-être d'autres catécholamines (fluorescence verte) sont disséminés au niveau du tronc cérébral. Un groupe très important est constitué par le "complexe coeruleen" d'ou partent trois faisceaux : le faisceau noradrénergique dorsal participe à l'innervatlon de la formation réticulée mesencéphalique et du cortex par de très nombreuses terminales très fines. On a pu calculer qu'un seul corps cellulaire pouvait ainsi prendre contact avec un grand nombre d'autres neurones par l'intermédiaire de plusieurs centaines de milliers de terminales. L'autre faisceau est le faisceau catécholaminergique intermediaire issu surtout du noyau subcoeruleus. Il contribue également à l'innervation des structures diencéphaliques et corticales par l'intermediaire de terminales plus épaisses que le faisceau dorsal. Enfin de la partie inférieure (caudale) du complexe coeruleen part un faisceau descendant.

Figure 5 A : Sérotonine et sommeil

L'inhibition de la synthèse de la sérotonine cérébrale par la p. chlorophénylalanine provoque une insomnie considérable (5 A). Celle-ci est immédiatement réversible par l'injection de faible dose de 5-HTP qui en court-circuitant l'étape de blocage, est capable de restaurer la synthèse et la libération de sérotonine. Une insomnie totale peut également être provoquée par coagulation des neurones serotoninergiques du système du raphé (5 B). On peut enfin détruire specifiquement les neurones serotononergiques grâce à un "poison" spécifique , la 5 6-HT (5 C). L'injection locale ou intraventriculaire de 5 6-HT entraîne une insomnie (diminution considérable du sommeil et du rêve) dont l'intensité est proportionnelle à la diminution de sérotonine.

Figure 5 B : Sérotonine et sommeil

L'inhibition de la synthèse de la sérotonine cérébrale par la p. chlorophénylalanine provoque une insomnie considérable (5 A). Celle-ci est immédiatement réversible par l'injection de faible dose de 5-HTP qui en court-circuitant l'étape de blocage, est capable de restaurer la synthèse et la libération de sérotonine. Une insomnie totale peut également être provoquée par coagulation des neurones serotoninergiques du système du raphé (5 B). On peut enfin détruire specifiquement les neurones serotononergiques grâce à un "poison" spécifique , la 5 6-HT (5 C). L'injection locale ou intraventriculaire de 5 6-HT entraîne une insomnie (diminution considérable du sommeil et du rêve) dont l'intensité est proportionnelle à la diminution de sérotonine.

Figure 5 : Sérotonine et sommeil

L'inhibition de la synthèse de la sérotonine cérébrale par la p. chlorophénylalanine provoque une insomnie considérable (5 A). Celle-ci est immédiatement réversible par l'injection de faible dose de 5-HTP qui en court-circuitant l'étape de blocage, est capable de restaurer la synthèse et la libération de sérotonine. Une insomnie totale peut également être provoquée par coagulation des neurones serotoninergiques du système du raphé (5 B). On peut enfin détruire specifiquement les neurones serotononergiques grâce à un "poison" spécifique , la 5 6-HT (5 C). L'injection locale ou intraventriculaire de 5 6-HT entraîne une insomnie (diminution considérable du sommeil et du rêve) dont l'intensité est proportionnelle à la diminution de sérotonine.

Figure 6 A : La partie caudale du locus coeruleus...

...apparaît comme une tache noire colorée par les monoamines oxydases (6 A). Cette région commande l'inhibition du tonus musculaire au cours du sommeil paradoxal (6 B). Si l'on détruit cette région par coagulation (6 C), l'inhibition ne peut alors survenir (6 D). L'animal présente alors un comportement hallucinatoire onirique très spectaculaire (6 E). Bien qu'il paraisse éveillé, et qu'il puisse attaquer un ennemi imaginaire, ses pupilles sont en myosis et il ne réagit absolument pas aux stimulations externes. En même temps, il présente les signes spécitiques cérébraux du rêve (pointes PGO). Il est donc légitime de parler de rêve même chez le chat.

Figure 6 B : La partie caudale du locus coeruleus...

...apparaît comme une tache noire colorée par les monoamines oxydases (6 A). Cette région commande l'inhibition du tonus musculaire au cours du sommeil paradoxal (6 B). Si l'on détruit cette région par coagulation (6 C), l'inhibition ne peut alors survenir (6 D). L'animal présente alors un comportement hallucinatoire onirique très spectaculaire (6 E). Bien qu'il paraisse éveillé, et qu'il puisse attaquer un ennemi imaginaire, ses pupilles sont en myosis et il ne réagit absolument pas aux stimulations externes. En même temps, il présente les signes spécitiques cérébraux du rêve (pointes PGO). Il est donc légitime de parler de rêve même chez le chat.

Figure 6 C : La partie caudale du locus coeruleus...

...apparaît comme une tache noire colorée par les monoamines oxydases (6 A). Cette région commande l'inhibition du tonus musculaire au cours du sommeil paradoxal (6 B). Si l'on détruit cette région par coagulation (6 C), l'inhibition ne peut alors survenir (6 D). L'animal présente alors un comportement hallucinatoire onirique très spectaculaire (6 E). Bien qu'il paraisse éveillé, et qu'il puisse attaquer un ennemi imaginaire, ses pupilles sont en myosis et il ne réagit absolument pas aux stimulations externes. En même temps, il présente les signes spécitiques cérébraux du rêve (pointes PGO). Il est donc légitime de parler de rêve même chez le chat.

Figure 6 D : La partie caudale du locus coeruleus...

...apparaît comme une tache noire colorée par les monoamines oxydases (6 A). Cette région commande l'inhibition du tonus musculaire au cours du sommeil paradoxal (6 B). Si l'on détruit cette région par coagulation (6 C), l'inhibition ne peut alors survenir (6 D). L'animal présente alors un comportement hallucinatoire onirique très spectaculaire (6 E). Bien qu'il paraisse éveillé, et qu'il puisse attaquer un ennemi imaginaire, ses pupilles sont en myosis et il ne réagit absolument pas aux stimulations externes. En même temps, il présente les signes spécitiques cérébraux du rêve (pointes PGO). Il est donc légitime de parler de rêve même chez le chat.

Figure 6 E : La partie caudale du locus coeruleus...

...apparaît comme une tache noire colorée par les monoamines oxydases (6 A). Cette région commande l'inhibition du tonus musculaire au cours du sommeil paradoxal (6 B). Si l'on détruit cette région par coagulation (6 C), l'inhibition ne peut alors survenir (6 D). L'animal présente alors un comportement hallucinatoire onirique très spectaculaire (6 E). Bien qu'il paraisse éveillé, et qu'il puisse attaquer un ennemi imaginaire, ses pupilles sont en myosis et il ne réagit absolument pas aux stimulations externes. En même temps, il présente les signes spécitiques cérébraux du rêve (pointes PGO). Il est donc légitime de parler de rêve même chez le chat.

Figure 7 : Evolution post-natale de la quantité de sommeil paradoxal chez deux nidicoles

Evolution post-natale de la quantité de sommeil paradoxal chez deux nidicoles, au cerveau immature (raton et chaton), et chez un nidifuge, dont la maturation a lieu in-utero (le cobaye). In utero, le cobaye présente des taux de sommeil paradoxal analogue au raton.