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Rêvent-ils ?
Ces foetus, ces nouveau-nés, rêvent-ils ? Roffwarg
(cf. note 1) parle de "répétition
hallucinatoire d'expériences accumulées", certains
de "manifestations psychiques" du sommeil. Le nouveau-né
rêve peut-être puisqu'il est capable d'une expérience
sensorielle et d'une activité mentale, il peut, par exemple, se
remémorer une phrase musicale entendue in utero, mais ses
rêves sont vraisemblablement encore très rudimentaires. Foulkes
(13) montre en effet qu'il existe une véritable ontogenèse
du rêve parallèle au développement des capacités
intellectuelles de l'enfant, qu'il faut pour rêver "au sens
adulte du terme" que l'enfant ait atteint un niveau mental qui lui
permette d'avoir accès à la pensée symbolique et
qu'il puisse raconter son rêve. Le tout début de cette phase
n'apparaît que vers l'âge de deux ans, et les rêves
sont encore, jusqu'à sept ans, très différents de
ceux de l'adulte: les images de ces rêves sont en effet très
statiques, les jeunes enfants sont peu impliqués dans leurs rêves
émotionnellement et physiquement. Alors que le rêve de l'adulte
est souvent "mouvementé" et très "égoïste":
nous nous gardons toujours le premier rôle, les implications émotionnelles
sont fortes.
Les fonctions du sommeil paradoxal sont certainement multiples et se
modifient probablement avec l'âge; au début de la vie, le
sommeil paradoxal permettrait peut-être de confronter nos programmes
instinctifs avec nos facultés cognitives. Les chats de Jouvet répètent
à blanc, au cours de leur sommeil paradoxal, les comportements
caractéristiques de l'espèce chat; en milieu enrichi, les
ratons de Mirmiran augmentent l'épaisseur de leur cortex, au cours
du sommeil paradoxal: le sommeil paradoxal permettrait l'organisation
et la reprogrammation périodique des comportements innés;
il pourrait aussi maintenir ou renforcer les connexions synaptiques préalablement
stimulées à l'éveil. Il pourrait être le lien
entre inné et acquis. Sa diminution très importante au cours
de la première année suggère qu'une de ses fonctions
les plus importantes est achevée. Le sommeil paradoxal est chez
le nouveau-né humain plus important que chez le nouveau-né
singe. On peut se demander si la persistance chez l'homme d'une grande
quantité de sommeil paradoxal après la naissance: phénomène
de néoténie (c'est-à-dire la persistance de caractères
foetaux au cours du développement), n'a pas été,
comme cela est souvent le cas, un avantage biologique. Ce phénomène
n'a-t-il pas favorisé, chez l'homme, un développement cortical
plus important, permettant des capacités cognitives plus grandes
?
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