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I. Phylogenèse des états de sommeilA) Les êtres unicellulaires et les plantesEn 1729, un astronome, Jean-Jacques d'Ortous de Mairan, enferme une sensitive (mimosa pudica) dans un cabinet noir. Il remarque alors que, même en l'absence d'alternance lumière-obscurité, les feuilles de la sensitive continuent à se redresser ou de se replier toutes les 24 heures. Il en conclut donc que cette plante avait une "horloge interne" qui lui donnait l'heure. Ce phénomène est universel puisqu'il existe également au niveau de l'activité de certaines enzymes chez des êtres unicellulaires (Acetabularia Euglena). Les mécanismes moléculaires de cette horloge sont encore inconnus. Ainsi, bien qu'il soit évidemment impossible de parler d'activité repos chez les algues et les plantes, il faut savoir qu'il existe dès l'apparition de la vie une horloge moléculaire circadienne chez tous les êtres vivants. B) Les états "voisins du sommeil" chez les invertébrésIl est bien connu que les insectes ont un rythme journalier de repos et d'activité. Ce rythme n'est pas simplement le reflet de l'alternance lumière obscurité car il peut continuer à être observé même si l'environnement ne fournit aucune indication de temps qui puisse servir de synchroniseur (ou Zeitgeber). Les preuves de l'existence d'un état proche du sommeil ont été trouvées sur des critères comportementaux et physiologiques, aussi bien chez le scorpion que chez l'abeille. Les corrélats du repos sont l'immobilité, une posture caractéristique, la diminution de la température, la baisse du tonus des muscles de la nuque, l'élévation du seuil d'éveil et une augmentation de la sensibilité des neurones visuels. Le scorpion ou la blatte passe de la position érigée, abdomen et tête redressés, à une position où le corps et la tête reposent à plat sur le sol. Chez l'abeille, la tête est inclinée et le tonus musculaire de la nuque réduit. Le seuil d'éveil, par des stimulations extérieures, s'élève. Dans le stade d'immobilité le plus profond, les antennes de l'abeille sont repliées contre la tête. Il semble qu'une régulation homéostasique commence à apparaître chez les insectes puisque des indices de mécanismes compensatoires ont été constatés aussi bien chez la blatte que le scorpion. En effet, le repos comportemental est plus long au cours de la récupération chez ces 2 espèces si la période d'activité est allongée (par des stimulations mécaniques, par exemple). C) Les états d'activité et d'inactivité chez les vertébrés polkilothermes(Bauchot, 1984; Karmanova, 1982; Tobler, 1992) Les poissons: Dans ce domaine, la majorité des recherches est seulement comportementale. L'existence d'états ressemblant au sommeil a été prouvée chez de nombreuses espèces. Certaines s'enfoncent dans le sable pour y passer la nuit. D'autres changent de couleur la nuit. Certains poissons perroquets peuvent secréter une enveloppe muqueuse dans laquelle ils restent sans bouger toute la nuit. Au cours de ces états de repos, les poissons réagissent plus lentement à des stimulations sensorielles. Chez la tanche (Tinca Tinca), on a pu enregistrer à la fois l'activité électrique du cerveau en même temps que l'activité des branchies et des différents muscles, le rythme respiratoire, le rythme cardiaque et enfin la réactivité à des stimulations sensorielles. Il n'existe pas de différences notables entre l'activité électrique rapide et de bas voltage du cerveau pendant l'éveil (nocturne) ou pendant le repos (diurne). D'autre part, à aucun moment il n'a été vu, au cours des longues périodes d'inactivité chez la tanche, de critères permettant de supposer qu'il puisse exister des périodes de mouvements oculaires accompagnées de variations végétatives. Rien ne permet donc d'afffirmer qu'un état périodique, analogue au sommeil paradoxal, soit présent chez les poissons. Les amphibiens: Les données concernant le sommeil des amphibiens sont encore rares. Certaines espèces ne manifestent pas de baisse de la vigilance pendant le repos comportemental (la grenouille-taureau), tandis que chez la grenouille arboricole, la réactivité aux stimulations sensorielles décroît au cours du repos. Comme chez les poissons, l'enregistrement de l'activité électrique cérébrale n'a pas permis de découvrir des différences significatives entre les périodes d'activité et d'inactivité, et il n'a pas été possible non plus de mettre en évidence de périodes de mouvements oculaires au cours des stades de quiescence. Les reptiles: Le sommeil de certains chéloniens (tortues), crocodiliens (alligators et caïmans), sauriens (lézards et serpents), a été étudié avec des enregistrements polygraphiques continus de l'électroencéphalogramme, du tonus musculaire, des mouvements oculaires et des rythmes cardiaques et respiratoires. L'EEG des reptiles présente quelques différences entre l'éveil et l'inactivité. Il devient alors plus lent et surtout apparaissent des ondes pointues de grande amplitude. Il est donc possible, chez les reptiles, de reconnaître le sommeil par le seul examen de l'EEG (ce qui est impossible chez les poissons et les amphibiens). Des épisodes associant mouvements oculaires rapides et variations du rythme cardiaque, d'une très grande brièveté (quelques secondes) et d'une grande rareté (quelques minutes sur des enregistrements de plusieurs semaines), ont été enregistrés chez des crocodiliens et des lézards. L'analogie de ces épisodes avec le sommeil paradoxal est encore très discutée. En conclusion, poissons, amphibiens et reptiles ne règlent pas leur température centrale, ils sont donc appelés poikilothermes ou ectothermes. Il existe de très fortes présomptions pour que l'état d'inactivité chez ces animaux soit déjà du sommeil puisque l'on a pu mettre en évidence des indices de régulation homéostatique chez des perches, des carpes et des goujons soumis à des privations de repos. L'activité forcée pendant des durées de 6 à 24 heures a ensuite été suivie d'un allongement de repos chez les 3 espèces. De même, des reptiles (caïmans, tortues, iguanes) présentent à la fois une augmentation de la durée du repos et peut-être de l'intensité du sommeil (augmentation de la fréquence des pointes au niveau de l'EEG) après des périodes d'activité prolongées artificiellement. Cependant, il n'existe aucune preuve comportementale ou polygraphique de l'existence de sommeil paradoxal chez les poikilothermes. D) Les états de sommeil chez les vertébrés homéothermes |
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